BENARES VARANASI
Essai pour ne pas perdre la poussière
Celle des ruelles où tu tavances puisque cest lheure et que tu as tout oublié de ta raison, celle de la société doù tu viens et que tu portes et dont tu te défends, là parmi ces autres, et chez toi tu te sentais chez toi ?
cela tu las oublié aussi
Lévidence cest ici, cette ruelle, ces échoppes, ces bruits de marteaux, ta faim.
Comment décrire, comment percevoir ?
Le rythme tu ne pouvais limaginer ni le souhaiter
comment comprendre partager un peu
comment décrypter ?Voici le Gange, le fleuve si réputé que tu cherches avidement jusquà ce quenfin accosté, un guide à demi moqueur temmène vers lhôtel accueil où tu pourras vivre.
Je naime pas décrire, mais ici il le faut, car ce lieu ma arrêté, interrogé comme je linterroge.
Varanassi, Kashi, Lumière,
la vieille ville du fleuve où tu marches en ce Noël, où tu remontes le temps, où tu ressens le battement dun cur au centre dun autre savoir.
à Christiane Tourlet
Palais temples mosquées dominant le fleuve
Ruelles qui descendent à pic vers leau
Mouvement incessant des hommes à la rivière
Hommes des rues qui se mélangent
Aux bufs et aux vaches
Ville commerces échoppes forges marchés
Rives construites rives désertées
La coudée intime lordre
A la nature à lhomme
De sarrêter enfin.
Le Gange Ganga la déesse lente la débordante
charriant de sa nef
la face construite des hommes
et la rive émerveillée den face
nue
sacrée
sable
carcasse des bateaux ces mirifiques
venus des temps
leurs lourdes rames
aucun moteur ne hante Ganga
immuable
la baignade des buffles et des enfants
La ville marécage
bords du monde
campements agités de feux
tremplins détoiles
la nuit accueille en sa serre dété les maudits et les
nombres
Quas-tu à écrire sur ce golfe de Gange
là où cela sarrête
et quil te semble mourir
à la vie éternelle
Accueilli des foules ici rejointes
accueilli
en ce repos
Terre plein sacré des barques sous la lune
Hymnes chantés toute la nuit dune voix rauque
Qui dira la science de dieu
Qui la témoignera ?
Morts marqués de Ram
baignant sous létoffe
couronnés
attendant le pyré
Les yeux des calcinés rongent la nuit
éclatent de rigueur
Ramayana le tambour et la voix
Ramayana
les doigts habiles sur les touches de lharmonium
Ramayana
tu es le mythe chanté à un carrefour actuel
répété guide
du nom de Ram
quel souvenir
lhomme
lhomme fait de bruits et de Ramayana
Le cortège maintient le mort
les passants se serrent à son passage
corps de bandelettes tressautant sur sa barque
Palais temples mosquées dominant le fleuve
Ruelles qui descendent à pic
Vers leau
La première fois
je retins mon souffle
la seconde
jexpirai
et fus dedans
Je descends les marches
je contemple leau le Gange
le sol est chaud
endormi lieu
celui-ci ta-t-il semblé absolu
autres chemins jy cours
sans cesse
je prie je crois jescalade
je bois du lait jai peur
je tourne dans des rues frappées de rouge
de requins
et de sifflets de rires quolibets
de calmes et de fouets
chiens crevés extases fureurs commerces
ustensiles pneus routes ponts
scandés de trains
trains immobiles dans des campagnes
carrefours lieux
voyageurs entassés dans des gares
sadhous nus
entrée des pauvres
Kashi lumière
Portes vers
Je tremble jappelle
où est mon corps
et les messages écoutés
les sarcasmes essuyés
les échanges monétaires
Je marche sur des épines
je me fonds en un tout
Révélé épris de joie
Est-elle si facile cette boisson monotone ?
Que fermente cette coupe
en moi mes lèvres débordent
Des enfants jouent au cerf volant
je suis accroché à cette ficelle
et si elle craque
ma foi je nen sais trop
peut-être le vent me poussera-t-il ?
haut
jaurai si peur
Je suis en un corps sans nom
je marche sur la grève
si loin que je pourrai
cerclé de mer
un crépuscule désert
je suis perdu
enfiévré
Lune saison nouvelle
Soir soir jour mémoire
Lequel est une extase?
Quand je penserai à toi
je munirai à toi
tu seras la lumière équilibre
une plénitude
secret
Je campe avec mes biens imaginés
la force qui ma poussé
en cet instant
où est-elle ?
Une voix se souvient
une main prend la mienne
Les femmes par centaines de barques
se rendent pour la fête
vagues pulsions chants
battements qui planent
essor
Théâtre lueur
sur la tête des femmes
qui portent ces lampes
agiles?
Corps couloirs labyrinthes pensées
Ah cessez ce pêle-mêle
je veux comprendre hurle le saint !
il sassoit psalmodie
dix ans
non je ny comprends rien
il se fait musicien
éplucheur de légumes
marcheurs
Extase de la démarche
Marcheurs proches
égarés dans votre lutte
à ne plus penser que de lêtre
lêtre tellement à ne plus savoir
Acte
agissant encore
indifférent
Brûle lacquit gonflé protégé
de ce feu
qui dévore et annule
Invisibles et sans nom
les pêcheurs dâmes ont rejeté leurs filets
Que cherchent le sorcier
et celui qui lépie?
Quel pain fondent-ils en un corps si peu commun
Quils se renvoient leurs égarements multiples ?
Cette trace dun pas
sur quelle poudre de cendre
Quel balbutiement
Quelle gifle de colère ?
Je contemple la lune
ma femme ma révélé la vie
je regarde la lune
la légende hésite se souvient
et te commande
une commande
je la décorerai je lenluminerai
je ferai de la lune une épée
japprendrai les symboles
Lamour la nuit
Le poème donne à lautre
la coupe avec le vin
Soit ce quil contemple
de linvisible esprit ou danse
Le temps ne sarrête quafin de tinviter
à chaque instant
à mesurer tes secondes
à leau de là
Corps constamment rejetant sur ses épaules
la même tâche
Vivre et encore vivre
au milieu de légarement et de la vieillesse
la terreur de lévidence
La course enflammée de mon cerveau
narrête pas les bufs
un buf vague erre et bouffe à létalage
Une saison roule et change de voyage
Je rencontrai cette route et me laissai rouler
sans imprécation ni hurlement moqueur
vers cette Chair
Les gestes des vivants
les gestes des statues
se répondent
Multitude des sentiers
tous divinisés
Marques mille fois répétés
regagnées sur le fleuve
qui efface
glissante eau signifiante
Cloches Cloches Rites Cloches
peuplés des nuits
Le rite accompli
marque un temps
qui lui aussi
accompli devient
indifférent
Le lieu nasse tattrappe te protège et te relance
Dans la fusion du muable
Là
Un lieu dimmuabilité
Tenu.
anton alain
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